Ce 3 ème jour de cessez le feu est dédié à Avigael. Cette petite fille, qui a été kidnappée le 7 octobre et qui a fêté ses 4 ans entres les mains du Hamas, a été libérée aujourd’hui presqu’à l’heure… Avec elle, 13 autres personnes dont 8 enfants. Après que ces parents aient été sauvagement assassinés devant ses yeux, la petite Avigael avait réussi à s’enfuir chez des voisins, le papa raconte l’avoir vu arriver livide, le visage blanc et couverte de sang. Il raconte l’avoir immédiatement prise dans ses bras et s’être rendu compte que ce sang n’était pas le sien. Il l’a vite faite rentrer à la maison avec sa femme et ses enfants. Il a demandé à sa femme de bien rester en sécurité à l’intérieur avec les petits et il est sorti voir ce qu’il se passait. Il a aidé ses amis, ses voisins, à combattre les terroristes et quand il est finalement revenu chez lui; sa femme, ses enfants et la petite Avigael avaient déjà disparu. Les deux petits frères d’Avigael seront retrouvés vivants à la maison, ils auront réussi à survivre en se cachant dans une armoire; les terroristes ont bien pris le soin de tirer à l’aveugle sur tous les meubles de la maison, dans un but de pure déstruction, mais ils ont tiré trop haut, les petits ont échappé aux tirs et sont restés silencieux pétrifiés en bas de l’armoire durant des heures
Ce soir la petite Avigael retrouvera sa famille; sa maman et son papa ne sont plus de ce monde mais ses deux frères, ses grand-parents, ses oncles et ses tantes seront là pour l’accueillir et lui donner tout l’amour dont elle a besoin.
Aujourd’hui , pour la première fois depuis le début du conflit, je suis descendue près de la frontière avec Gaza et l’Egypte. L’armée israélienne a déclaré toute la frontière zone militaire fermée, j’ai pu rentrer car mon frère qui est combattant réserviste et qui était en permission pour le week-end a eu un souci avec sa voiture, je l’ai donc ramené moi même à sa base. 2h30 de voiture et nous pénétrons dans cette région que l’on appelle en hébreu Otef Aza, que l’on peut traduire en français comme “l’enveloppe de Gaza”. Toute une série de villages agricoles appelés “kibboutzim” sont sur cette frontière et jouent un rôle de tampon entres Gaza et le reste d’Israël, leurs habitants sont les premiers exposés en cas de problèmes à la frontière. Ma première visite dans l’un des ces “kibboutz” était en juillet dernier, une visite au kibboutz Béeri avec l’une de mes filles. Un petit coin de paradis, où vit une communauté chaleureuse. Une population éduquée, riche humainement, sans aucune arrogance. Un village constitué de petites maisons identiques pour la plupart, toutes avec des petits jardins fleuris et bien entretenus, beaucoup d’espace vert, de gazon, d’aires de jeux. Aujourd’hui je ne suis pas retournée à Béeri qui est plus au nord, j’étais au Sud, vers la frontière Egyptienne, à Souffa, près de Kerem Shalom sur la route 232.
Nous avons roulé sur cette route, cette même route où ce 7 octobre des centaines de voitures ont été brûlées avec leur passagers à l’intérieur, cette même route où les corps abbatus jonchaient sur le sol. J’ai pu voir de mes propres yeux ces “megonites”, ses abris en béton armé, où tant de jeunes en pensant pouvoir se protéger ont perdu la vie dans des souffrances terribles. Je suis passée devant cette station essence qui avait été prise d’assaut par des terroristes, qui à défaut de pouvoir tuer les deux employés qui s’y trouvaient, ont pillé les rayons et mis à sac la boutique. J’ai pu voir le long de la route ces barrières de protection défoncées par les tanks venus à la rescousse. Puis lorsque nous sommes arrivés à proximité de Kerem Shalom, nous avons roulé doucement et il m’a montré comment il avait dû zigzaguer entres les corps pour pouvoir avancer. On a ouvert la fenêtre et l’air semblait encore imprégné de cette odeur de brûlé, bien entendu les pauvres corps carbonisés ont été retirés mais les arbres sans feuilles aux troncs noirs charbons sont encore là debouts, comme des témoins de l’horreur de ce que les jeunes ont vécu. Nous continuons à rouler et au loin, une très grande barrière électrique jaune nous attend et nous y voila, nous sommes arrivés au kibboutz Souffa, un endroit si plein de vie qui est devenu un village fantôme. Quelques chats s’y promènent et même eux ont l’air triste et perdu, on voit Gaza au loin mais on n’entend plus rien, du fait de la trêve les combats ont cessés et il règne un silence de mort. J’ai déposé mon frère près d’un grand bâtiment qui servait de restaurant du Kibboutz, une grande salle à manger commune où les habitants pouvaient se retrouver pour manger et qui fait aujourd’hui office de grand dortoir; c’est là que les soldats dorment, à même le sol depuis plus d’un mois. Je lui ai demandé si je pouvais aller aux toilettes avant de reprendre la route et il m’a conduit au dortoir des filles, des petites maisonnettes réservées aux jeunes célibataires du Kibboutz. Tout à l’intérieur est figé, on sent dans chaque détail de la pièce l’urgence dans laquelle elles ont du quitter les lieux. Des lits défaits, des armoires ouvertes, des sacs à moitié remplis et laissés par terre, des affaires en vrac… Au travers de ces pieces brutalisées je voyais toutes ces vies brisées. Je n’avais qu’une envie, tout ranger avant de partir; nettoyer, plier et laver le linge, faire en sorte que ces chambres retrouvent un peu d’ordre, de sérénité et soient prêtes accueillir les survivants.
J’ai quitté Souffa en fin d’après-midi, j’ai repris le même chemin dans le sens inverse, j’ai laissé derrière moi cette zone de guerre et ces militaires sans qui notre vie ici ne serait qu’une pure utopie.
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This 3rd day of ceasefire is dedicated to Avigael. This little girl who was kidnapped on October 7th and who celebrated her 4th birthday in the hands of Hamas, was released today almost on time… Along with her, 13 other people including 8 children. After her parents were brutally murdered in front of her, little Avigael managed to escape to the neighbors. The father said he saw her arriving livid, white-faced and covered in blood. He says he immediately took her in his arms and realized that the blood was not hers. He quickly got her home with his wife and children. He asked his wife to stay safe inside with the little ones and he went outside to see what was going on. He helped his friends, his neighbors, fight the terrorists and when he returned home, to make sure everything was okay there, his wife, his children and little Avigael had already disappeared. Later on, he will find in Avigael’s house the two brothers of the little girl, they managed to survive by staying for hours hidden in a cupboard, the terrorists took care to shoot blindly on the furniture but they shot too high, the little ones escaped the shots and remained silent, petrified at the bottom of the cupboard.
This evening little Avigael will be reunited with her family, her mom and dad are no longer in this world but her brothers, her grandparents, her uncles and aunts will be there to welcome her and give her all the love she needs.
Today for the first time since the start of the war I went down south near the border with Gaza and Egypt. The Israeli army declared the entire border a closed military zone, I was able to enter the area because my brother who is a reservist fighter and who was on leave for the weekend had a problem with his car, so I brought him back myself to his base. 2h30 by car and we enter this region which in Hebrew is called “Otef Aza”, which can be translated into English as the envelope of Gaza. Many agricultural villages called “kibbutzim” are on this border and play a buffer role between Gaza and the rest of Israel, their inhabitants are the first exposed in the event of problems at the border. My first visit to one of these “kibbutzim” of the south, was last July, a visit to Kibbutz Beeri with one of my daughters. A little paradise, where a warm community lives. An educated population, humanly rich, without any arrogance. A village made up of small, mostly identical houses, all with small flowery and well-kept gardens, lots of green space, grass, and play areas. Today I did not return to Bééri which is further north, I went South, towards the Egyptian border, in Souffa, near Kerem Shalom on road 232.
We drove on this road, this same road where on October 7th, hundreds of cars were burned with their passengers inside, this same road where the slaughtered bodies were strewn on the ground. I was able to see with my own eyes these “megonites”, these reinforced concrete shelters, where so many young people, thinking they could protect themselves, lost their lives in terrible suffering. I passed in front of this gas station which had been stormed by terrorists, who, failing to kill the two employees who were hiding, looted the shelves and ransacked the store. Along the road, I could see these protective barriers broken down by the tanks coming to the rescue. Then, when we arrived near Kerem Shalom, we drove slowly and my brother told me how he had to zigzag between the bodies to be able to move forward. We opened the window and the air still seemed permeated with this burning smell. Of course the poor charred bodies had been removed but the leafless trees with coal-black trunks were still standing there, like witnesses to the horror that the young people lived. We continued driving and in the distance, a very large yellow electric barrier awaited us and there we were, we had arrived at Kibbutz Souffa. This place so full of life has become a ghost village. A few cats are walking there and even them look sad and lost, we can see Gaza in the distance but we can no longer hear anything, due to the truce, the fighting has stopped and there is dead silence. I dropped my brother off, near a large building which served as the Kibbutz restaurant, a large common dining room where residents could have meals together, and which today serves as a large dormitory office; this is where the soldiers sleep, on the ground for more than a month. I asked my brother if I could go to the bathroom before hitting the road again and he took me to the girls’ dormitory, small houses reserved for young single girls from the Kibbutz. Everything inside is frozen, we feel in every detail of the room the urgency in which people had to leave the premises. Unmade beds, open wardrobes, half-filled bags left on the floor, loose belongings… Through these brutalized rooms I could feel all these broken lives. I just wanted to put everything away before leaving; cleaning, pinching and washing the linen, ensuring that these rooms find a little order and serenity.
I left Souffa at the end of the afternoon, I took the same path in the opposite direction, I left behind this war zone and these soldiers without whom our life on this land would be nothing but an impossible dream.