L’hiver en Israël est doux et plutôt agréable sauf quand il pleut et ce matin la pluie était au rendez vous; ce n’est jamais une petite pluie fine, ce sont des torrents d’eau qui s’abattent sur le pays et qui nous font penser que l’histoire de l’arche de Noé a sûrement éxisté… Cette nuit je ne savais plus si les booms que l’on entendait étaient des avions de chasse en direction du Nord, des missiles interceptés par le dôme de fer ou tout simplement le tonnerre. Mes chiens non plus ne savaient plus vraiment pourquoi ou contre quoi aboyer… Ce matin on s’est tous réveillés un peu fatigué, pas vraiment reposé mais en ouvrant les volets j’avais la réponse à mes interrogations de la nuit, c’était juste un gros orage et il grondait encore.
Nous sommes samedi et le samedi j’ai comme activité principale, attendre le coup de fil de ma fille, pour savoir si on peut venir la voir à la base. Avec ce mauvais temps, je me demande si cela va être possible car sur le parking où nous nous retrouvons, il n’y pas d’endroit a l’abri. Elle pourrait bien monter en voiture avec nous mais avec son arme qui prend beaucoup de place ce n’est pas une situation idéale . Peu importe, comme je ne perdrai jamais une occasion de passer un peu de temps avec elle, si elle veut que l’on vienne on viendra malgré la pluie. Quand elle appelle enfin vers midi, elle n’est pas sûre de son emploi du temps mais ce dont elle est sûre c’est qu’il ne pleut pas, là où elle se trouve le soleil brille.
Une nouvelle très encourageante qui me pousse à sortir immédiatement faire des courses pour lui acheter ce dont elle a besoin. Nous célébrons en ce moment la fête de Hanoukha, la fête des lumières qui symbolise la victoire de la lumière sur l’obscurité, ce qui prend tout son sens dans le drame que nous vivons depuis deux mois. Chaque jour nous allumons une bougie, plus une supplémentaire et ce pendant 8 jours. Aujourd’hui on devrait allumer la 3eme bougie. Dans la célébration de cette fête, il est de coutume d’offrir des cadeaux aux enfants et de manger des beignets. Je prévois d’ailleurs d’amener une Hanoukia (un chandelier) avec nous à la base, pour que nous puissions allumer les bougies tous ensemble. J’ achète donc en plus de ce qu’elle ma demandé ( petite tomates concombres carottes fruits) de nombreux beignets pour distribuer aux autres soldats sur place ainsi que des chocolats.
Une de mes cousines à qui j’avais proposé de venir voir ma fille se joint à nous et complète mes achats avec tout un attirail de sucreries et autres gourmandises . Entres temps ma fille me confirme bien que l’on peut venir vers 16h. On prend la route sous la pluie mais plus nous avançons dans la direction de sa base, plus le temps devient clement. A 20 minutes de notre destination, un accident sur la route cause un gros embouteillage, beaucoup de ralentissement, nous roulons au pas, 10 minutes se passent et ma soldate nous téléphone demandant où nous sommes. Elle est arrivée a l’entrée de la base pour nous attendre mais elle vient d’être rappelée par son commandant, son unité doit sortir en mission.
Elle n’a pas le temps de remonter chercher ses affaires, ils vont directement la récupérer à la sortie de la base avec son chien et tout l’équipement. Elle est très déçue et nous encore plus. Il ne nous reste plus qu’à faire demi tour, quand la route soudain se dégage . On est plus très loin de chez elle alors je décide d’y aller quand même; avec un peu de chance, la voiture qui doit la récupérer n’est peut-être pas encore passée. Je roule vite mais sans excès, nous arrivons et effectivement j’avais vu juste, elle est encore là à attendre. J’ai à peine stoppé la voiture pour descendre l’embrasser que la camionnette de l’armée qui doit la récupérer arrive aussi, on a juste le temps de l’embrasser et elle s’en va.
On l’aura vu 5 secondes. Elle n’a pu rien prendre de ce qu’on lui a amené, je voulais laisser le sac au poste de garde mais elle n’a pas voulu car elle ne savait pas quand elle serait de retour à sa base. On a repris le chemin en sens inverse pour rentrer à la maison. Sur le chemin du retour on est passé par Tel-Aviv, on voulait voir la place des otages, (en hébreu Kikar harhatoufim). C’est une place qui a été renommée ainsi depuis que toutes les familles des otages y ont élu en quelques sortes résidence, c’est là qu’elles se retrouvent, protestent et reçoivent le soutien de personnes anomymes ou de figures publiques.
Ensuite nous nous sommes rendues toujours à Tel-aviv à une exposition en memoire de ceux qui sont tombés à la fête Nova. Cette visite nous a beaucoup secouées, tous les objets récupérés sur le site du massacre y sont exposés, cela va des paires de chaussures et de lunettes perdues , jusqu’aux tentes et aux sacs à dos abandonnés sur place, en passant par les carcasses des voitures brûlées et les cabines de toilettes jaunes aux portes mitraillées. Une visite très douloureuse qui nous a plongé dans l’horreur de ce que ces jeunes ont vécu et qui légitimise la guerre que nous menons contre ces monstres sans âmes. Nous sommes sorties de cette visite bouleversées, attristées mais surtout profondément en colère !!!
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Winter in Israel is mild and rather pleasant except when it rains and this morning it is raining; it is never a light rain, it is torrents of water which fall on the country and which make us think that the story of Noah’s ark surely existed… This night I couldn’t tell if the booms we heard were fighter planes heading north, missiles intercepted by the Iron Dome or simply thunder. My dogs didn’t really know why or what to bark at anymore either… This morning we all woke up a little tired, not really rested but by opening the shutters I had the answer to my questions from the night, it was just a big storm and it was still rumbling.
Today is Saturday and on Saturdays, my main activity is to wait for my daughter’s phone call to find out if we can come see her at the base. With this bad weather, I wonder if this will be possible because in the parking lot where we find ourselves, there is no shelter. She could go inside the car with us but with her gun taking up a lot of space it’s not an ideal situation. It doesn’t matter, as I will never miss an opportunity to spend some time with her, if she wants us to come we will come despite the rain and the lack of room in the car. When she finally calls around noon, she is not sure of her schedule but what she is sure of is that it is not raining, where she is the sun is shining.
Very encouraging news that pushes me to immediately go out shopping to buy her what she needs. We are currently celebrating Hanoukha, which symbolizes the victory of light over darkness, it takes on its full meaning in the drama that we have been experiencing for two months. Every day we light one candle, plus one extra, for 8 days. Today we should light the 3rd candle and it is customary to give gifts to children and eat donuts. I’m planning to bring a Hanukkah (a chandelier) with us to the base, I want us to light the candles all together. So in addition to what she asked for (small tomatoes, cucumbers, carrots, fruit) I bought many donuts to distribute to the other soldiers on site as well as chocolates.
One of my cousins to whom I had suggested coming to see my daughter joined us and completed my purchases with a whole array of sweets and other delicacies. In the meantime, my soldier confirms that we can come at around 4 p.m. We take the road in the rain but the further we advance in the direction of her base, the milder the weather becomes. 20 minutes from our destination, an accident on the road causes a big traffic jam, a lot of slowdown, we drive at a walking pace, 10 minutes pass and she calls us asking where we are. She arrived at the entrance to the base to wait for us but she has just been called back by her commander, her unit must go out on a mission.
She doesn’t have time to go back up to get her things, they will pick her up directly at the exit of the base with her dog and all the equipment. She is very disappointed and we are even more so. I am about to turn around, when the road suddenly clears. We’re not very far from the base so I decide to go anyway; if we are lucky, the car that’s supposed to pick her up might not have come by yet. I drive quickly but not excessively, we arrive and indeed I was right, she is still there waiting for them. I’ve barely stopped the car to go down and kiss her when the army van that’s supposed to pick her up also arrives, we just have time to kiss her and she leaves.
We saw her for 5 seconds. She couldn’t take anything that was brought to her, I wanted to leave the bag at the guard post but she didn’t want to because she didn’t know when she would be back at her base. We took the route back home. On the way, we passed through Tel Aviv, we wanted to see the hostages’ square (in Hebrew Kikar harhatoufim). It is a place that has been renamed like this since all the families of the hostages took up residence there, it is there that they meet, protest and receive the support of anonymous people or public figures.
Then we went to Tel Aviv to an exhibition in memory of those who fell at the Nova festival. This visit shook us a lot, all the objects recovered from the massacre site are on display, ranging from lost pairs of shoes and glasses, to tents and backpacks abandoned on site, including the carcasses of burned cars and yellow toilet cubicles with machine-gunned doors. A very painful visit which plunged us into the horror of what these young people experienced and which legitimizes the war we are waging against these soulless monsters. We left this visit upset, saddened but above all deeply angry!!!